jeudi 18 août 2016

18 juin au 25 juillet 2016 - Tadjikistan, ou "Les Malheurs de Jonas", par la comtesse de Cédur

Une fois passée le poste-frontière kirghize, l'ascension est longue pour atteindre le col Kyzylart (4280 m). Les derniers virages en lacets sont d'une inclinaison bien barbare et nous coupent le souffle et les jambes. Au col souffle un vent fou, nous ne nous attardons pas. Nous dévalons la piste jusqu'à la frontière tadjike que nous atteignons à 17 h. Nous sommes surpris par la rapidité des formalités, nos passeports sont visés et tamponnés en un tour de main. Nous voici donc enfin sur la célèbre "Pamir Highway", route du Pamir, ou plus tristement "route de la drogue". Selon notre ami Wikipedia, il s'agirait de la deuxième plus haute route du monde, après celle de Karakorum qui relie la Chine au Pakistan. Nous nous apprêtons à traverser la région autonome du Haut-Badakhshan, province montagneuse qui couvre environ 45% du territoire tadjik mais ne contient que 3% de la population. Pour y accéder, il nous a fallu obtenir un permis spécial en plus de notre visa.

Passé le poste-frontière, une piste de tôle ondulée descend vertigineusement dans une immense plaine désertique aux allures lunaires. Nous sommes heureux de nous laisser propulser par un bon vent de dos, nous roulons au maximum avant de poser le camp.

Le fameux bouquetin qui veille sur le col Kyzylart.
L'incontournable des photos de cyclos.
Bienvenue au Tadjikistan!
Premiers coups de pédale sur la mythique Pamir Highway (si si, Highway). Notez le magnifique exemplaire de "tôle ondulée". Ça secoue!
Bordant la frontière avec la province chinoise du Xinjiang, la Pamir Highway suit sur des centaines de kilomètres une imposante clôture de barbelés. Derrière s'étend un immense no man's land entre les deux pays.

Le bivouac est planté à la tombée du jour, à 4100 m d'altitude. Superbe plateau, un vent à décorner les derniers argalis Marco Polo du coin... et un réchaud qui choisit ce moment-là pour tomber en rade, malgré trois nettoyages successifs ! La pompe est morte, plus moyen d'avoir une flamme pour nos repas. Pas moins de 9h de vélo, 1100 m de montée, un campement à plus de 4000 m d'altitude et la seule chose que l'on pourra manger ce soir sera une salade de concombres et tomates.... Voilà de quoi mettre le couple à rude épreuve. Jonas est dans ses p'tits souliers (rappelez-vous, dans l'épisode précédent, il avait crânement refusé de racheter un réchaud) et Emma fait la gueule "tu fais caquer de jamais écouter c'qu'on t'dit!". Le lendemain matin, on aurait donné notre royaume pour un thé chaud, mais après de nouvelles tentatives de lavage et démontage du réchaud, toujours rien. On se met en route, l'ambiance est morose. Le souffle court, Jonas s'arrête pour récolter quelques brindilles et bouts de bois pour un éventuel feu de camp pour le soir. James nous rattrape dans la montée, et propose de nous donner son réchaud à alcool fabriqué avec une canette en alu. Bon, cela va nous dépanner le temps que l'on puisse racheter un réchaud, on pourra à nouveau manger des repas chauds. 

Un petit col nous gratifie d'une superbe vue sur le lac Karakul. Nous nous laissons glisser avec bonheur dans la plaine qui s'étend sous nos yeux. Sur le chemin qui mène au village de Karakul, nous croisons 8 cyclistes et un Hollandais qui traverse le pays à pied en tirant un chariot (!). Dans le hameau nous nous arrêtons pour partager avec James et Adrian un repas frugal à base de mantis (sorte de dumplings), puis reprenons la route qui longe le magnifique lac aux eaux turquoise.

Freedom!
Karakul
Karakul
Le lac dans son écrin de montagnes
En route pour le col Ak-Baital avec James
Camping lunaire en compagnie de James et Adrian
Nous roulons sur de belles lignes droites asphaltées, puis sur de la tôle ondulée du pire acabit avant d'entamer l'ascension du célèbre col Ak-Baital, 4655 m, le Graal de tous les cyclo-voyageurs au Tadjikistan. La montée, toujours sur de la piste, est bien raide. L'oxygène est plus rare à cette altitude, nous avons le souffle un peu court, mais heureusement pas de signe de mal de l'altitude.

Le soleil tape méchamment à cette altitude
Ak-Baital, c'est au fond à gauche
On se prépare à attaquer la montée du col
Le panneau, au pied de la montée.
On ne se lasse pas du décor environnant
Le petit point noir au fond c'est Jonas
On a réussi!
James et Adrian savourent également leur exploit
La vue de l'autre côté du col est saisissante. Un maelström de couches géologiques aux tons ocres et blanchâtres nous laisse sans voix. La descente est goudronnée, quel confort! Nous nous laissons glisser, aidés par un léger vent dans le dos. En route pour Murghab, nous avisons un joli spot de camping sur l'herbe, au bord du ruisseau prenant sa source au col Ak-Baital. L'eau est fraîche, mais que diable! Nous y prenons le bain, afin de nous décrasser de la poussière collée à la transpiration de ces derniers jours.

De l'autre côté du col, un vrai tableau!
On se sent tout petit dans un tel environnement
Un fort joli bivouac
Le lendemain nous parvenons à Murghab en début d'après-midi, le moral et le physique dans les chaussettes (surtout Jonas qui a plus de prise au vent). En effet, nous nous sommes pris un puissant vent de face sur les 35 km de descente. Notre vitesse moyenne frisant les 10km/h, nous avons largement dépassé le temps escompté pour une telle distance. Nous retrouvons nos 2 acolytes anglais James et Adrian à l’Hôtel Pamir. Perchée à 3650 m d'altitude, Murghab est la plus haute ville du Tadjikistan et d'ex-URSS. Nous décidons d'y prendre un jour de pause. Jonas sillonne la ville pour trouver une pharmacie qui vende de l'alcool à 95% pour le réchaud-canette, puis on descend au bazaar pour remplir nos sacoches de victuailles.

Des panneaux bien cryptiques
Clint Eastwood Jonas arrive dans un grand état de détresse psychologique, après avoir peiné sous le vent contraire
Murghab city, Haut-Badakhshan, 3650 m d'altitude, moins de 4000 habitants
Déjà plus de 400 km depuis Osh...
Station-service locale
Depuis Murghab, nous nous payons quotidiennement un fort vent de face. Nous avalons péniblement 30 à 40 km par jour. Et pour trouver un lieu de bivouac à l'abri du vent, on oublie! Nous rejoignons Alichur, puis, une vingtaine de kilomètres plus loin nous quittons la M41 pour descendre au village tant rêvé de Bulunkul, avec son beau lac salé du même nom et ses mythiques sources chaudes en plein air. En descendant les 16 km de piste très mauvaise pour rejoindre le lac, Jonas ne trouve rien de mieux à faire que de casser sa jante avant... Quelle poisse ce vélo! L'ambiance est plombée, Emma et James avaient vu juste, il aurait fallu changer les 2 jantes à Osh. Que faire, nous sommes perdus au fin fond du Pamir avec une jante fendue. Doutes et questionnements... Nous mangeons notre souper en silence, la larmichette à l'oeil, attaqués par des nuées de moustiques affamés. Pour la suite, la nuit portera conseil. Au lendemain de cette fâcheuse mésaventure, on décide de rejoindre à pied le village de Bulunkul à 4 km, avec la jante rafistolée au duct tape. Arrivés au hameau, un groupe de villageois s’attroupe autour du vélo. L'un d'eux propose d'encoller la jante avec de la superglue 2 composants. Pourquoi pas, ce n'est pas comme si on avait le choix. Un peu sceptiques, nous observons les mecs embardoufler la jante de colle chinoise...

Km 523, et toujours un sale vent de face!
Des marmottons insouciants jouent hors de leur terrier, sans trop se préoccuper de notre présence...
Une guesthouse à Alichur
La mosquée d'Alichur
Dans toute l'Asie Centrale, l'heure est au lavage des tapis, l'affaire des femmes.
On fait ça dans l'herbe, sur le trottoir, parfois même sur la route. Et ça frotte,ça frotte, ça rince...


Sur sa fidèle monture, Clint fonce vers son destin
Le lac salé Sasykkul
Bulunkul. Abandonnez tout espoir, vous qui entrez ici...
Le lac salé Bulunkul. Lisse comme un miroir... et infesté de moustiques 
Lac de Bulunkul. Au matin, l'ambiance n'est pas à la fête... 
Bulunkul, le trou du cul village du bout du monde
C'pas la Coop City hein
Collage de jante. Du travail de pro!
Fatigués de nos émotions et exténués par la chaleur, nous laissons tomber l'idée de monter aux sources d'eau chaude, d'autant que le point GPS qu'on nous a refilé pour les trouver est bien foireux (Hein Éric! Fessée!). Nous demandons une voiture pour nous reconduire sur la M41, nous voulons nous épargner les 16 km de piste en sens inverse, histoire de ménager la jante (et nos mollets). Un taxi s'organise: dernier réglage sous le capot et quelques litres d'essence, on réalise que les habitants ne quittent pas souvent ce village perdu au milieu de nulle part. Nous réussissons à insérer les vélos dans la fourgonnette, et partons après des adieux sympathiques aux villageois. Nous quittons à peine le village que la voiture tombe déjà (!) en panne. Plus moyen de démarrer! Un mécano, grosse barbe, lunettes RayBan et salopette kaki, sera notre sauveur. Il lui faudra pas moins d'une demi-heure de bricole pour faire redémarrer l'engin. Nous sommes sauvés des griffes de Bulunkul. De retour sur la Pamir Highway M41, Emma exprime son souhait de passer quoi qu'il en soit par la vallée de la Wakhan qui longe la rivière Panj, mais Jonas pense qu'il serait plus approprié de rester sur l'asphalte de la M41, avec sa jante en sursis. On imagine devoir prendre des chemins différents quelque temps, mais comment partager les affaires, la tente et le matériel de cuisine? Et en fait, on n'a pas envie de se séparer. Alors, en route pour les quelques 300 km de piste endiablée, et advienne que pourra! Jonas dégonfle un peu le pneu avant, roule doucement à la descente et slalome entre les cailloux de la longue montée du col Kargush culminant à 4130 m.

Le lac Chukurkul, idéal pour un beau bivouac.
Pour Jonas, la descente de l'autre côté se fera intégralement sur le frein arrière, le frein avant étant inutilisable. Acérée et infranchissable, l'imposante chaîne de l'Hindu Kush se dévoile à nous. À cheval sur la frontière pakistano-afghane, son sommet le plus élevé plafonne à 7708 m. Jonas rêve d'ascension tandis qu'Emma croque les reliefs enneigés. Le soleil brille et le vent souffle encore et toujours face à nous!

Au fond, l'Afghanistan...
Descente du Col Kargush, on est crevé et fait pas chaud!
L'important, c'est de regarder dans la même direction.
La descente dans la vallée de la rivière Pamir
La tumultueuse rivière Pamir. Plus loin, elle s'unit à la Wakhan pour former la Panj, frontière naturelle avec l'Afghanistan
Un vrai tableau de peintre romantique
Ça c'est du bivouac ma bonne dame! Fenêtre avec vue sur l'Hindu Kush
La route caillouteuse, à flanc de montagne sur des kilomètres
Du gaz sous les roues
Enfin, nous apercevons la vallée de la Wakhan en contrebas
En arrivant à Langar, le premier village de la vallée (2800 m), nous sommes surpris de voir tant de verdure, des allées ombragées, bordées d'arbres, des champs de céréales, de petits canaux d'irrigation au bord des chemins, tout cela dans un précis enchevêtrement de murs de pierres sèches. Après la rareté de la végétation sur les plateaux à 4000 m, nous redécouvrons avec bonheur le vert et les couleurs des fleurs. Nous avons gagné plusieurs degrés, les sandales ressortent du sac... Nos profitons d'une nuit dans une homestay locale, avec une douche et un bon repas.

Étonnamment, la jante collée a plutôt bien tenu le coup jusqu'ici. Plus d'une centaine de kilomètres de cailloux, de "tôle ondulée", de passages à gué et de bancs de sable! Toutefois, Jonas assure ses arrières en rajoutant du duct tape sur la colle qui tend à craquer. Poursuivant notre évolution dans cette vallée tantôt verdoyante, tantôt désertique, nous longeons la rivière Panj qui fait office de frontière naturelle avec l'Afghanistan sur 1200 kilomètres. Chemin faisant, nous découvrons avec bonheur des sources d'eau minérale riche en fer, jaillissant de la roche par de petits tuyaux. On s'en remplit une bonne bouteille et on pense aux fontaines de Scuol. Nous traversons des petits villages qui se ressemblent, principalement des maisons de pierre sèche et de mortier, au toit plat, quelques-unes en briques recouvertes de terre, et même de belles maisons en dur de type russe.

Si le nord et l'est du Pamir sont habités majoritairement par des Kirghizes semi-nomades turcophones, la population pamirie, de langue iranienne, se concentre elle essentiellement dans la vallée du Panj. Les Pamiris sont ismaéliens, un courant minoritaire chiite, où la femme est l'égale de l'homme. Les Tadjiks sont eux sunnites. Vous nous suivez? Pour en savoir plus sur le sujet, voici un article très intéressant: http://www.iris-france.org/docs/kfm_docs/docs/analyses-iris/2012-07-pamir-rene-cagnat.pdf

Depuis notre entrée au Tadjikistan, il ne se passe pas une journée sans que nous ne rencontrions quelques cyclistes. La plupart des cyclos voyagent dans l'autre sens. Sachant ce qui les attend, nous leur souhaitons bonne ascension, heureux d'avoir fait ça à la descente... Aujourd'hui, nous croisons un Hollandais et un Slovène, puis un Français, Nicolas, et un Australien, Ben, avec qui nous bivouaquons. Nous partageons le repas avec 2 réchauds à benzine, ça va plus vite. Jonas sort son réchaud à alcool pour le café du lendemain. On échange nos expériences et autres péripéties, on rigole un peu et nous nous couchons sous un ciel tout étoilé.

Cyclistes de l'extrême
Et nous voilà dans la vallée de la Wakhan. Encore de la piste et du sable pour un bon moment!
La porte d'un Mazar (sanctuaire) pamiri. Ici reposent les reliques d'un saint homme
Les sources minérales ferrugineuses
Un aventurier polonais, en route pour le Pamir en moto de la 2ème Guerre Mondiale
Une aventurière portant sur des centaines de kilomètres de route non-asphaltée
 les lourdes sacoches avant de son compagnon qui a la jante pétée!
La montagne, ça nous grise!
Peintures traditionnelles sur le mur d'enceinte d'un musée local.
Ruelle d'un village wakhani
La vallée est fertile
Parfois, pour changer de l'ordinaire, un peu d'asphalte tout défoncé
En compagnie de Ben l'Autralien, nous continuons notre progression en direction d'Ishkashim. 60 km avant la ville, c'est au tour de Jonas d'être terrassé par une grosse tourista qui le vide de toute son énergie, entre autres. Durant la nuit il lui faut sortir de la tente plusieurs fois pour se soulager, malgré la tempête de sable qui s'abat sur le bivouac. Au lendemain, fiévreux et déshydraté, il prend la décision d'attendre sur place un 4x4 qui pourra le prendre en stop. Par chance, le premier véhicule qui passe (et il n'y en a pas beaucoup dans le coin) s'arrête et l'embarque avec le vélo sur le toit, direction Ishkashim où un hôtel avec une douche et un bon lit l'attendent. Pendant ce temps, Ben et Emma luttent toute la journée contre le vent de face tempétueux pour atteindre la ville. C'est parfois pénible la vie de voyageur-cycliste!

Depuis Ishkashim, il reste 2 journées de vélo jusqu'à Khorog. Nous sommes depuis 10 jours en face de l'Afghanistan, avec ses petits villages de terre accrochés au flanc de la montagne. Mimant de grosses barbes, les locaux nous racontent que les Talibans font des apparitions dans cette partie du pays. Nous n'observons pourtant que des fermières aux habits colorés et au visage découvert et des paysans accompagnés de leur âne.

Peu après Ishkashim, on dégote un bassin d'eau chaude à côté de la Panj. Un vrai régal!
On abuse des selfies
Des patchs de verdure côté afghan
Ben et Jonas s'octroyent une petite sieste
 À Khorog, Jonas dégote une jante nue dans la vitrine d'échange de matériel de la Pamir Lodge. Entre deux passages aux toilettes, il entreprend de rayonner la jante trouvée. Le problème est que son axe a seulement 32 trous alors que cette jante en a 36. Avec l'aide et les conseils de Jordi, un cyclo-mécano de Barcelone, ils réussissent tout de même à faire tourner la roue de manière plutôt correcte, bien que certains rayons soient lâches. À chaque tour de roue ça couine, mais ça devrait tenir jusqu'à Dushanbe, où Jonas espère trouver une nouvelle roue complète..

Dans une petite épicerie de Khorog, nous nous faisons spontanément inviter par un jeune docteur pour venir prendre le repas du soir chez lui. Nous rencontrons son épouse, une femme brillante et douce qui travaille au sein d'Helvetas pour l'aide au développement de son pays. Lui a étudié la médecine au Pakistan et elle a fait un Master à l'Université de St Andrews. Tous deux parlent un anglais quasiment parfait et sont très cultivés. Nous réalisons combien la doctrine ismaélienne place la femme sur un même pied d'égalité que l'homme. Tous deux évoquent avec passion l'Aga Khan, leurs croyances, leur travail et leurs espérances pour le futur. Sous le charme nous les quittons, reconnaissants pour leur accueil simple et généreux. 

Jordi montre à Jonas comment rayonner sa roue
Les belles enseignes peintes du Tadjikistan
Un mariage pamiri dans les rues de Khorog
Les paysages qui nous environnent nous plaisent énormément, mais notre santé est très fluctuante. Dès le petit matin, il commence à faire très chaud, la route n'en finit pas avec ses "up and down", alors qu'on descend la rivière. Trois jours après son rétablissement à Khorog, Jonas attrape un coup de chaud. Cette insolation lui vaut une grosse fièvre accompagnée d'une nouvelle diarrhée. Les symptômes ont apparu juste avant de s'effondrer sur les nattes de la première homestay qu'on trouve, 45km avant Kalaikhum. Encore une journée dans le coltar, couché sur les matelas ou assis sur les toilettes. Pas drôle! Le jour suivant c'est au tour d'Emma de se sentir fébrile et de visiter fréquemment les toilettes. Alors qu'on aurait voulu partir tôt pour bénéficier de quelques heures de fraîcheur, nous sommes incapables de reprendre la route. On n'attend plus que d'arriver à la capitale, pour pouvoir se retaper de notre aventure pamiri. Mais c'est encore à 350 km, alors il faut prendre son courage à deux mains...

Lorsqu'enfin nous quittons la homestay, la tête dans les choux, il fait déjà une chaleur écrasante. Il nous faut pas moins de 5h pour avaler péniblement les derniers 45 km avant Kalaikhum où nous prenons un nouveau jour de pause.

En face, l'Afghanistan. Mystérieux et malheureusement à jamais interdit pour nous
Pause de midi dans une chaikana
Ben et Emma posent (pausent) sur la route de Kalaikhum
Village afghan en contrebas
Des paysages grandioses
Les grands-mères de la homestay où nous avons comaté un jour entier
Les pêcheurs de la Panj
Chaleur écrasante... 
Encore et toujours de la piste, encore et toujours la Panj, boueuse
Les facétieux gamins de Kalaikhum.
Au Tadjikistan, le mono-sourcil est un critère de beauté chez les femmes.
Pour rallier Dushanbe il existe deux possibilités: la route du sud, plus longue mais plus facile car asphaltée en majeure partie, et la route du nord, qui implique de passer le col Sagirdast (3252 m), c'est-à-dire une montée de 2000 m sur de la piste dégueulasse. N'étant tous les deux pas très en forme, nous optons avec regret pour la route du sud, dans l'idée de faire du stop jusqu'à Dushanbe. Nous continuons donc à descendre au bord de la rivière Panj sur environ 70 km.

Visite du Camion Dentiste dans les villages du Tadjikistan.
Bon, Emma va encore attendre un peu pour son implant.
Le lendemain, après le repas de midi, on trouve un camionneur qui veut bien nous prendre avec lui jusqu'à Dushanbe, à 300 km au nord. Il faudra attendre jusqu'en fin de journée pour qu'il démarre, car la route est fermée au trafic des camions jusqu'à 20h, à cause de travaux sur une grande portion de la route. Heureusement, on peut rester allongé des heures sur les matelas de notre chaikana pour attendre. Et aussi en profiter pour boire deux guêpes avec le thé et se retrouver avec une langue qui a doublé de volume (Emma). Comme si les piqûres de punaises de lit ne suffisaient pas...

Bref, le camion démarre lorsque le soleil commence à disparaître, remorquant un collègue dont l'engin est en panne. Du coup on roule à 15 km/h autant en montée qu'en descente, sur les 30 premiers km, on est vert! Il finit par larguer son boulet à une station de réparation, juste avant de s'engager dans la montée du col. C'est ainsi que nous quittons le Haut-Badakhshan. Notre camionneur bourru, dont on ne saura jamais le nom, s'arrête vers 2 h du mat au bord de la route et nous invite à dormir sur la banquette à l'arrière. Emma reste sur le siège passager, pendant que Jonas trouve le sommeil sur le matelas. On somnole 3 h et on repart au petit matin. Les vélos sont posés à plat dans le conteneur sur des énormes cailloux. On espère les retrouver moins cassés que nous à l'arrivée! Monsieur nous dépose 20 km avant la capitale, à 10 h du matin. Le voyage nous aura coûté 200 somoni (45 chf) et duré 14 h pour 300 km, soit du 20 km/h de moyenne !

On rejoint facilement la Greenhouse Hostel où nous rencontrons d'innombrables cyclistes, en route soit depuis l'Europe, soit depuis la Chine, ou comme nous depuis le Kirghizistan. Nous retrouvons également James, qui est arrivé bien avant nous à Dushanbe. Ici nous pouvons «enfin» nous reposer, mettre à jour le blog, essayer de retaper nos estomacs et déposer nos demandes pour les visas iranien, ouzbèke et turkmène. Nous restons une semaine dans cette sympathique auberge dont les chambres sont dotées d'air conditionné. Par contre, de nombreux voyageurs tombent malades les uns après les autres. C'est impressionnant. Jonas n'y échappe pas, son estomac refait des siennes plusieurs jours durant! C'est vraiment sans fin...

Jonas apporte sa roue à réparer au bazaar. Il paie environ 30 francs suisses pour faire rerayonner la jante trouvée à Khorog, sur le vieux hub de James qui a le bon nombre de trous (le hub, pas James). Jonas pense s'être un peu fait rouler sur le prix du travail, mais au moins ça permettra de rentrer! 

Nous reprenons la route un lundi, accompagné de notre ami James, en direction de la redoutée frontière ouzbèke... Fouillage en règle de tous les bagages, y-compris ordinateur, appareil photo et téléphone portable. De quoi passer un bon moment.

Dushanbe, le mur des Réformateurs 
Une ville en pleine expansion
Sur la route pour l'Ouzbékistan. Un dîner shashliks avec notre ami James, le British fou!